
Thriller français (2022) de Sébastien Marnier, avec Laure Calamy, Jacques Weber, Dominique Blanc, Doria Tillier, Suzanne Clément, Céleste Brunnquell – 2h05
Stéphane, une jeune femme mystérieuse, prend contact avec son père qu’elle n’a jamais connu, un riche homme d’affaires vivant dans une luxueuse villa sur l’île de Porquerolles. Alors qu’il l’introduit chez lui, elle se heurte vite à l’accueil franc et particulièrement dérangeant des femmes de la maison : son épouse dépensière Louise, son ambitieuse fille George, l’adolescente de celle-ci ainsi qu’une gouvernante acariâtre.
Vous l’aurez compris à la lecture de ce pitch, et on va tacher de pas spoiler davantage, L’Origine du mal s’impose donc comme un thriller à rebondissement, œuvrant dans un sport très prisé du cinéma français : tirer sur la bourgeoisie, pour une pratique qui tend souvent au règlement de compte familial… Et de famille dysfonctionnelle, il en sera évidemment question ici, Sébastien Marnier, après sa classe de L’heure de la sortie, choisissant cette fois-ci comme terrain de jeu resserré un foyer rococo cossu qui dissimule mal un véritable champ de bataille entre l’homme de la maison et ses femmes venimeuses. Marchant évidemment sur les traces de Clouzot et de Chabrol, ou plus récemment Parasite pour citer la perle du catalogue Jokers, L’Origine du mal, dans son fétichisme baroque, n’est pas non plus sans évoquer Le Limier de Mankiewicz, les motifs du jeu laissant place à d’autres plus animaliers. Se jouant de la théâtralité de son entreprise, Sébastien Marnier fait s’entrechoquer les différents registres de son casting meta de film français, détonnant joyeusement avec celui affiché par Le film français, dans une mise en scène qui ne ménage pas ses effets, bien au contraire.

Split-screen, inserts radicaux, scope composé et mouvements d’appareil… le réalisateur est bien décidé à s’amuser avec son spectateur et fait habilement évoluer ses effets de manche, accompagnant les masques qui tombent, tandis que ses actrices prennent un plaisir communicatif sur un texte qui ne manque ni de perversité, ni de mordant. Au-delà des punchlines, L’Origine du mal semble écrit sur mesure pour Laure Calamy, lui offrant un rôle à la hauteur de son ambivalence. Bon, des énigmatiques premiers plans jusqu’à sa résolution tout en tension, il y a vraiment ici matière à divulgâcher et, Sébastien Marnier ayant concocté un spectacle tout aussi étrange mais bien plus réjouissant que L’heure de la sortie, on préfère s’en tenir là et vous laisser découvrir cette Origine du mal, quitte à revenir nous dire ce que vous en avez pensé…
CLÉMENT MARIE