Sea Fever

Film d’horreur irlandais, britannique, suédois, belge, américain (2019) de Neasa Hardiman, avec Hermione Corfield, Dougray Scott, Connie Nielsen, Ardalun Esmali, Jack Hickey, Olwen Fouéré et Elie Bouakaze – 1h35

Une jeune étudiante en biologie fait un stage sur un chalutier. Peu après le départ en mer, le navire est immobilisé par une étrange créature…

Si je peux me permettre des confidences sur le blog, je dois dire que j’ai horreur des fonds marins et de leur terrifiante obscurité pouvant dissimuler un monstre titanesque que les biologistes n’auraient certainement pas encore répertorié. Heureusement que Bruce prenait l’eau, ça m’a permis de voir Les Dents de la mer sans trop de problèmes – à moins qu’il soit à l’origine du mal ? Abyss est un chef-d’œuvre autant que James Cameron est un taré pour plonger dans les plus profondes fosses de la planète. C’était pour moi une torture de voir Le Monde de Némo au cinéma dont le poisson-lampe (forcément, venant de Pixar…) m’a foutu une trouille bleue. Un jour que je devais tester le son d’En eaux troubles dans le cinéma où je bosse, j’ai passé toute la séance les yeux fermés (et on m’a dit plus tard que j’avais bien fait). Quant au récent Underwater, je doute d’avoir un jour la force de le regarder, même si j’ai bien réussi à me coltiner Le Grand Bleu… Aussi, quand j’ai reçu le DVD de Sea Fever avec le dernier numéro de Mad Movies, dont la jaquette montre un gigantesque poulpe prêt à émerger de sous un minuscule chalutier, je n’en menais pas large. Mais j’ai réussi à le regarder (j’entends d’ici vos applaudissements et vous en remercie), ce qui n’était finalement pas si compliqué. Déjà parce que la créature du film ne ressemble pas du tout à celle de la jaquette, et aussi parce que le petit budget du film ne lui permet pas de quitter tellement le pont du navire…

Sea Fever est le second long-métrage de l’irlandaise Neasa Hardiman, petite-fille de pêcheur (c’est pour ça !), qui a passé l’essentiel d’une carrière de près de vingt ans à la télévision. Fan de films d’horreur (Alien et The Thing sont allégrement cités), elle a voulu s’y essayer à son tour avec ce film de monstre, créé avec l’aide d’un biologiste pour concentrer les caractéristiques de différentes espèces en une seule créature, et a été bien accueillie dans la communauté du genre puisque Sea Fever a été présenté en compétition aux festivals de Sitges et Gérardmer. On y suit donc les aventures d’une étudiante (Hermione Corfield, ressemblant un peu à Karen Gillan) arrivant sur le chalutier d’un couple de pêcheurs rodés (Dougray Scott et Connie Nielsen, salut, ça fait plaisir de vous revoir !) forcé à l’arrêt par une créature tentaculaire et bioluminescente qui pulvérise à bord une toxine mortelle. Un joli programme pour un film d’horreur qui, malheureusement, ménage ses efforts. Pas seulement à cause du budget qu’on devine serré, Sea Fever s’accommodant bien de la suggestion qui s’impose. C’est plutôt au niveau du récit et des thématiques que le film se montre prudent. Voulant s’assurer de mener son histoire à bon port, le film est ballotté entre des influences mal dégrossies et de bonnes idées timides.

Le capitaine (Dougray Scott) procède au dépistage de son équipage : « T’inquiète pas, matelot, j’ai vu faire dans The Thing, et puis c’est pas comme si j’avais joué que des méchants dans ma carrière… »

Les influences, ce sont donc un peu d’Alien et beaucoup de The Thing, le film de monstre tournant au film d’infection. Sea Fever reprend à son compte des scènes entières de ce dernier (la visite d’un bateau ayant déjà croisé la créature, la scène du dépistage) pour un résultat, vous vous en doutez, qui ne soutient pas la comparaison avec le chef-d’œuvre de Carpenter. A ces lourds passages obligés, Neasa Hardiman y oppose des idées intéressantes qui ne font toutefois pas assez long feu pour l’emporter. On notera par exemple l’opposition entre la jeune scientifique rationnelle et les loups de mer superstitieux, qui se méfient d’elle parce qu’elle est rousse et que ça porte malheur sur un bateau (mille milliards de mille sabords !), ce qui bouscule humblement les habitudes d’un genre où c’est généralement la croyance ancestrale qui gagne sur l’esprit cartésien. Alors qu’on pressent déjà les divergences à venir dans l’équipage, cette opposition s’évapore au fil des mésaventures. La créature est aussi étonnante, notamment par son mode de prédation peu commun. Mais on n’en saura pas beaucoup plus non plus, le film ne voulant pas se risquer dans des eaux troubles. Entre grosse tradition du genre et petites curiosités scientifiques, on vous laissera donc choisir votre camp pour apprécier, ou non, la croisière mouvementée de Sea Fever

BASTIEN MARIE

Publicité

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s