Hors normes

2633779Comédie dramatique française (2019) d’Olivier Nakache et Eric Toledano, avec Vincent Cassel, Reda Kateb, Hélène Vincent, Bryan Mialoudama, Alban Ivanov, Catherine Mouchet, Lyna Khoudri, Frédéric Pierrot et Suliane Brahim – 1h54

Bruno et Malik gèrent depuis vingt ans deux associations respectives qui accueillent des autistes qualifiés d' »hyper-complexes » et forment des jeunes de banlieue pour les encadrer. Face à l’importante croissance de leurs associations, des inspecteurs du ministère de la santé viennent enquêter…

Olivier Nakache et Eric Toledano ont rencontré le personnage principal de Hors normes dans les années 90 alors qu’il venait de créer l’association Le Silence des justes et qu’eux n’étaient que moniteurs de colonies de vacances et pas encore réalisateurs de Nos Jours heureux. En 2006, pour Canal +, les réalisateurs ont tourné un documentaire d’une demi-heure sur l’association appelé On devrait en faire un film. C’est maintenant chose faite avec Hors normes, dans lequel Vincent Cassel et Reda Kateb partagent l’affiche avec des autistes castés dans l’atelier théâtre d’une autre association, Turbulences. Le film, sorte d’élargissement d’Intouchables avec ses banlieusards s’occupant d’handicapés, a eu les honneurs du festival de Cannes qu’il clôturait, consécration pour les deux cinéastes mêlant le prestige à leurs succès populaires. Et puis ils y avaient toujours plus leur place que Nicolas Bedos…

Hors normes commence très fort avec son générique intermittent et sa musique sonnant comme un électrocardiogramme rythmant la fuite d’une jeune femme dans les rues de Paris, poursuivie par de jeunes hommes. Ceux-ci finissent par mettre la main dessus, tentant de détourner le regard des passants et embarque la jeune femme dans un van. C’est un kidnapping ? Non, ne vous inquiétez pas ma bonne dame, elle est autiste et nous nous occupons d’elle, même sans autorisation. D’entrée de jeu, Hors normes flirte avec le hors-la-loi, et c’est bien normal pour parler d’associations agissant sans approbation officielle pour s’occuper de cas extrême d’autisme dont les hôpitaux ne veulent pas, pour contenir une différence refoulée par la société qui ne veut pas la voir. D’entrée de jeu, Toledano et Nakache nous plongent dans une urgence qui est le quotidien de ces associations, à défaut de pouvoir trouver une solution à l’urgence de la situation. « Trouver une solution », c’est d’ailleurs le credo de Bruno, joué par un Vincent Cassel impérial de tendresse, d’humanité et de calme, c’est la devise qu’il sort immanquablement comme réponse à toute question laissée en suspens. Toledano et Nakache n’ont eux-mêmes pas la prétention de pouvoir répondre à la question mais, se maintenant dans l’énergie de leur film, pensent qu’un regard humain et empathique est déjà une partie de la solution. Et ce regard est porté par leur cinéma toujours aussi juste, où l’humour et l’émotion surgissent toujours avec autant d’aisance.

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Bruno (Vincent Cassel) fait un câlin à Joseph, un de ses autistes : on est bien loin de la haine…

Comme souvent chez eux, il y a quelques légères insuffisances, le sentiment que le sujet n’est pas poussé assez loin. Ainsi, la bonté naturelle des personnages de Vincent Cassel et Reda Kateb n’est jamais remise en question, expliquée ou complexifiée (cela dit, leur foi non plus). De même, les autistes restent des personnages secondaires du film, dont on montre peu la violence et l’imprévisibilité dont on ne fait que parler le plus souvent. Mais ça n’empêche pas de reconnaître la sensibilité à l’oeuvre, les acteurs autistes entrant dans la fiction sans problème. Quant aux protagonistes, eux-mêmes n’ont guère le temps de se poser pour réfléchir sur eux dans leur quotidien sur la brèche. Toledano et Nakache s’en tiennent à la constatation et le font très bien, montrant par quel humanisme l’association tient coûte que coûte, inventant ses propres normes que l’état ne peut vraisemblablement pas assimiler. Les mauvaises langues diront que les deux réalisateurs s’en tiennent aux bons sentiments, à la pub caritative (d’ailleurs, 5% des recettes du film seront reversés au Silence des justes), mais avec des virages dramatiques mieux négociés que dans Samba, Hors normes ne serait-il pas leur meilleur film ? « On est pas loin ».

BASTIEN MARIE

Autre film d’Eric Toledano et Olivier Nakache sur le Super Marie Blog : Le Sens de la fête (2017)

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